Dring.. Dring ( notre téléphone fait encore dring, dring…)…
« Bonjour c’est Anne-Marie Héraut. ; nous avons pris l’apéritif ensemble il y a quelques jours… »
- Oui ?!?
Notre village est jumelé avec un village d’Alsace – MACKENHEIM – et je suis la présidente du comité de jumelage.
- Ah oui …. !?!
Tous les 4 ans nous recevons environ 50 habitants pendant quelques jours
- C’est bien…
Je vous téléphone pour vous demander si vous pourriez loger deux d’entre eux…
- Ben c’est que le gîte est complet….
Non, non, pas dans le gîte, mais chez vous
- Ah….
Danielle, qui écoutait la conversation dit « pourquoi pas ? »
- Ben oui alors, si Danielle le dit …
Ils arrivent mercredi soir vers 18.30. rendez vous à la mairie pour faire connaissance et accueillir « vos « alsaciens.
mercredi 18.45, nous sommes un peu en retard.
La salle de réunion de la mairie est archi bondée. Des Alsaciens, des Périgourdins, .. et nous… Hop la .. on a marché sur des pieds alsaciens ….
Les maires de nos deux communes nous accueillent, Anne-Marie nous présente « nos alsaciens ; Carmen et Roland ». On boit un verre, puis deux, des toasts circulent. Ça parle des fois pas comme nous …
Certains semblent se connaître depuis longtemps.
Pendant quelques jours, nous faisons partager à Carmen et Roland cette Dordogne que nous aimons. Des liens se créent. De plus en plus fort. Nous apprécions, tous les quatre, la bonne table. C’est la fête, la bonne humeur, le partage, le rire…
Le comité de jumelage a bien fait les choses . Visites, repas dansant ( et quelles danses !!). Le maire de Mackenheim nous fait déguster le fameux Kougelof accompagné d'un gewurztraminer bien venu !
...Et petit à petit, nous apprenons le pourquoi du jumelage.
Le trait d’union s’est tracé en septembre 1939. Déclaration de la guerre. Evacuation d’urgence. Les habitants de Strasbourg et de la région du Ried partent pour le sud-ouest.
En l’espace de deux heures il faut abandonner les champs, les récoltes, les animaux, les fermes , les maisons et partir… avec un peu de nourriture et 30 kg de bagages maximum.
On attelle des chars aux chevaux, aux vaches, aux chiens. On charge. On pleure. On s'embrasse. On part. Le voyage est long, trop long, improvisé. Certains prennent le train. La plupart dans des wagons de bestiaux. Les plus adroits y bricolent des toilettes. Les trains sont ralentis, déviés pour laisser passer les trains qui montent au front. Le voyage dure jusqu'à 6 jours.
A l’arrivée à Périgueux, les bénévoles de la croix rouge font le maximum pour réconforter ces gens fatigués, désespérés. Les périgourdins se souviennent des réfugiés républicains espagnols de 1936. Ca ne s'était pas toujours bien passé. Les nouveaux exilés parlent l’alsacien., langue proche de l’Allemand. La confusion est facile. Elle est parfois faite.
La Dordogne, rurale parle plutôt l’occitan. La cohabitation n’est pas évidente.
La générosité périgourdine reprend le dessus. Chaque village du sud-ouest se voit associé à un village d’Alsace. Environ 80 000 Alsaciens découvriront la Dordogne alors peuplée de 350 000 habitants !
C'est le temps des vendanges, il faut rentrer le tabac, soigner les bêtes, couper du bois. Les alsaciens, jeunes et vieux s'y mettent de bon coeur.
C’est ainsi que Saint-Cyprien et Mackenheim écrivent d’une même plume quelques pages de leur histoire. Voilà peut être pourquoi, au moment du départ du car pour le retour à Mackenheim, les gorges se sont serrées, les yeux ont rougi…
Encore merci à Anne-Marie et à tous ceux et celles qui ont contribué à l'organisation de ces quelques journées.
J’ai trouvé ce livre, écrit récemment, témoignage poignant de cette éxode :
Ce livre, disponible dans les bonnes librairies d'Alsace et de Dordogne, est aussi distribué sur tout le territoire français à travers un réseau de grandes enseignes (FNAC, Auchan...). Voir
aussi Geneanet
Il est évidemment possible de le commander directement à l'éditeur A. Sutton
158 pages.
Prix du livre : 20 €